Le constant est implacable : l’agriculture familiale a beau être cruciale puisqu’elle nourrit, pour
l’essentiel, l’humanité, elle n’est que rarement rentable-du moins sur un plan financier. Les conséquences sont immédiates : désertion des campagnes et concentration des fermes entre les mains de quelques-uns.
C’est pour contrecarrer cette évolution que les pays développés et émergents ont décidé d’apporter des subventions multiformes à leurs paysans, d’accorder un soutien direct aux ménages. C’est ce mécanisme qui a déclenché le développement exponentiel de leur agriculture et permis d’engranger des excédents substantiels qui inondent nos marchés.
L’Afrique, et le Burundi en particulier, peuvent –ils se permettre de faire l’économie de ce débat ?
Est-il possible d’éradiquer la faim, de s’extirper de la misère sans aide directe aux ménages
agricoles ? Telle est la question existentielle que pose l’association pour la dignité paysanne(ADIP), dans cette étude très fouillée qui propose toute une série de réponses.
En examinant des programmes de soutien à l’agriculture africaine, par les pouvoirs publics et leurs partenaires, on retombe souvent sur les mêmes réticences, les mêmes prétextes à l’inaction : nos pays ne disposent pas de budgets nécessaires, les paysans vont détourner ces fonds vers d’autres priorités, il est impossible d’avoir des références pour mettre en place un subventionnement équitable tant qu’on ne dispose pas de chiffres précis sur les productions, les superficies, etc. Ce sont ces limites, ces obstacles que cette étude cherche à briser ; elle se base sur l’expérience des programmes qui ont « osé » - des transferts monétaires non conditionnels, coopératives Sangwe, petite expérience d’ADIP. Dans un deuxième temps, elle propose des mécanismes qu’il suffirait de perfectionner, dans un esprit de concertation.
Cessons de pratiquer la politique de l’autrice, ne laissons plus la production alimentaire entre les mains de pays qui ont bien compris l’enjeu. Il y va de notre survie, il y va de notre souveraineté ! D’après ces analyses, des subventions de 100.000 francs burundais par an et par ménage, sur base régulière, pourraient révolutionner notre agriculture, et vaincre la pauvreté. On pourra se satisfaire d’un budget de 200 milliards de francs ce qui se représente, somme toute, que 6% du budget national et 1 % du PIB.
La conclusion qui s’impose est qu’une aide directe aux paysans, loin d’être une utopie, est la condition sine qua non pour sortir de l’impasse du mal-développement. Puissent les décideurs
entendre notre cri, en faveur des petits producteurs. Mais aussi dans la perspective d’un « vrai » développement du Burundi.