L'agriculture familiale constitue une préoccupation mondiale majeure qui contribue à améliorer les systèmes alimentaires mondiaux. Lors de l'atelier de restitution de l'étude sur la plus-value et les limites de l'agriculture familiale versus commerciale au Burundi, Charles Nahimana, président du GPA (Groupe de Plaidoyer Agricole), a souligné l'importance de ce modèle. Cet atelier s'est tenu le 21 septembre 2023 à l'hôtel Royal Palace en Mairie de Bujumbura.
L'objectif de cet atelier est de présenter les résultats de l'étude commanditée par l'ADIP (Association pour la Dignité Paysanne), en partenariat avec UHACOM, ADISCO et INADES-FORMATION BURUNDI et en collaboration avec le GPA. Selon Charles Nahimana, Président du GPA, l'agriculture familiale a fait preuve d'une résilience exceptionnelle en fournissant les moyens de survie et les revenus essentiels à la grande majorité de la population. Ce sont les 85% de la population exploitant de très petites parcelles de moins de 0,5 hectare à quelques hectares qui fournissent la quasi-totalité des aliments qui nourrissent le pays et produisent l’essentiel des exportations nationales.
Deogratias Niyonkuru, secrétaire général de l'ADIP, souligne que l'agriculture familiale peut générer des revenus consistants et améliorer le niveau de vie des petits agriculteurs pourvu qu’elle bénéficie de soutiens nécessaires. L’étude a souligné à juste titre qu’il faut supprimer la dualité entre agriculture familiale et commerciale. Elle a clairement montré qu’il existe quatre modèles d’agricultures familiales à savoir : l'agriculture familiale de subsistance, l'agriculture familiale d'autoconsommation à visée commerciale, l'agriculture familiale à visée commerciale en plus de l'agriculture agro-industrielle. Pour Deogratias Niyonkuru, ces 4 systèmes de production sont essentiels et devraient développer de fortes synergies au lieu de se faire la concurrence.
Le consultant international, lui, considère que les agriculteurs familiaux permettent de garantir un développement qui tient compte de la question environnementale et climatique. « Ils maintiennent mieux la fertilité des sols que les agricultures commerciaux, car ces derniers utilisent souvent les pesticides et engrais, et dès que les terres exploitées sont dégradées, ils les abandonnent pour en exploiter d’autres ailleurs ».
Chaque modèle d’agriculture familiale comporte un volet commercial et plutôt que d’amplifier les oppositions sommes toutes apparentes entre les modèles. Il est impérieux de travailler à renforcer les synergies entre eux comme le préconise cet excellent schéma du consultant.
Comme le Burundi s’engage aujourd’hui dans la construction de deux agropoles, il sera donc important que ces derniers ne se concentrent pas uniquement sur l'agriculture commerciale. Il faut plutôt établir de fortes relations avec les petits agriculteurs afin de les aider à améliorer leurs exploitations.
Pour l’adoption des pratiques agroécologiques
L'analyse du Dr Marius R. Nkounawa, consultant, confirme l'importance de renforcer l'agriculture familiale. Selon lui, l'agriculture familiale répond le mieux aux enjeux de sécurité alimentaire et nutritionnelle. Les modes de production et d'autoconsommation sont de véritables stratégies de production pour les familles. L'autoconsommation atténue le besoin d’importation et les pratiques agroécologiques sont plus facilement adoptées par les producteurs familiaux. Malgré que, l'agriculture familiale emploie 90% de la population active, offrant ainsi des opportunités d'auto-emploi à une part importante de la population ; elle satisfait la demande locale à 97% par les modes de production familiaux.
« Il est donc primordial de renforcer le soutien aux agriculteurs familiaux afin de surmonter les obstacles auxquels ils sont confrontés et d'améliorer leurs moyens de travail.», ajoute le consultant, Marius R. Nkounawa,
Une pratique conseillée
«Les modèles qu’il faut construire pour notre pays (le Burundi), sont ceux qui permettent des échanges et des renforcements mutuels entre les agricultures plus commerciales et les agricultures plus familiales. Il faut éviter de limiter l’agriculture familiale à l’agriculture de substance. Le plus important des avantages de l’agriculture familiale est de maintenir la fertilité des terres et pratiquer une agriculture plus durable», souligne Deogratias Niyonkuru, Secrétaire Général de l’ADIP.
L’étude indique que l’agropole n’est pas incompatible avec l’agriculture familiale. Il faut simplement bien cadrer sa vision. Les agropoles doivent être clarifiés et organisés dans un partenariat public privé autour de différents acteurs.
Les principales recommandations de l’atelier ont été:
A. Recommandations au Gouvernement
B. Recommandations aux promoteurs de l’étude et à la société civile en général
Suite aux arguments très convaincants de l’étude qui explique qu’il n’existe pas un seul modèle d’agriculture familiale, mais plusieurs, les participants recommandent à la société civile agricole d’intégrer cette donnée importante dans son combat et d’œuvrer pour renforcer des synergies entre les quatre modèles proposés et éviter de cristalliser des oppositions qui peuvent devenir dommageables au développement du pays.
C. Recommandation spéciale au FIDA et à la FAO
Etant donné que le FIDA et la FAO ont reçu le mandat des Nations-Unies de coordonner la décennie de l’agriculture familiale, les participants demandent instamment au FIDA et à la FAO au Burundi de s’acquitter de cette responsabilité.
L'atelier a réuni différents acteurs clés du développement, tels que des parlementaires, de hauts cadres de l’Etat, des cadres du ministère ayant l'Agriculture dans ses attributions, des représentants des coopérations nationales et internationales, des représentants d'organisations de producteurs, des cadres d'ONG locales ainsi que certains producteurs agricoles, véritables preuves vivantes que l’agriculture familiale est en mesure de répondre aux principaux défis de notre pays à condition de bénéficier de soutiens et accompagnements nécessaires.
Valère Niyokindi